Bayle et la "normalité" religieuse

Discipline: Philosophie
Parution: 12 octobre 2007

Description

Dans la France de Louis XIV, la « normalité » religieuse posait une équivalence entre l’appartenance au royaume et la confession catholique : en 1685, la révocation de l’édit de Nantes ne fit à cet égard que sanctionner une conviction largement majoritaire, voire une évidence. Face à cette doxa, Pierre Bayle, protestant français exilé en Hollande, partisan inconditionnel de la liberté de conscience, défend une position originale sur le spectre philosophique : loin de mettre en cause les fondements de l’autorité politique au nom d’un idéal religieux, il milite au contraire en faveur d’un pouvoir fort, capable de tenir tête aux clergés de toutes obédiences. Mais parallèlement, il souligne que, si les corps des sujets peuvent être persécutés, leurs esprits resteront toujours hors d’atteinte du monarque, fût-il un tyran : il ne pourra jamais obtenir que les humains placés sous son autorité pensent ou croient différemment de leurs convictions. De ces deux fortes thèses émerge une posture laïque avant la lettre, et le renoncement à toute position surplombante au nom de la prétention à détenir la vérité ; en défendant les « droits de la conscience errante », Bayle ouvre une voie philosophique originale : notre modernité en a hérité, mais elle n’a pas fini d’en tirer toutes les conséquences.


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